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La Première Guerre mondiale fait émerger une nouvelle préoccupation, relative aux marchés de guerre et aux bénéfices excessifs. La loi du 1er juillet 1916 avait déjà institué une contribution extraordinaire sur les bénéfices exceptionnels ou supplémentaires réalisés pendant la guerre. Mais elle ne distinguait pas les marchés passés avec une clientèle privée de ceux passés avec les administrations publiques. Dans le sillage de ces considérations, plusieurs projets de loi furent déposés à partir de 1919. C'est finalement la loi de finances du 31 mai 1933, dans son article 138, qui crée un Jury national des marchés de guerre. Cette nouvelle structure est compétente pour identifier les bénéfices excessifs et les sanctionner par le biais d'une révisiona posteriorides marchés passés pendant la guerre. Le Jury national est chargé de la révision des marchés de guerre « passés par l'État, les départements, les communes et les établissements publics entre le 1er août 1914 et le 25 octobre 1919, [ainsi que des marchés] concernant la liquidation des stocks sans adjudication publique - en suite de la guerre - ou la reconstruction des régions libérées. ». Au terme de la loi, les marchés de guerre supérieurs à 500 000 francs passés par un même fournisseur lui sont obligatoirement soumis.
La loi du 31 mai 1933 établit le siège du Jury national à Paris et définit ses conditions générales d'organisation et de fonctionnement. Le Jury national des marchés de guerre est ainsi présidé par un président de section du Conseil d'État et divisé en trois sections (respectivement présidées par un conseiller à la Cour de cassation, un conseiller d'État et un conseiller maître à la Cour des comptes). Il statue, pour certaines affaires, en section plénière. Chaque section compte plusieurs membres dont un maître des requêtes au Conseil d'État, commissaire du Gouvernement. La procédure devant le Jury national et l'organisation de ce dernier sont respectivement fixées par les décrets du 18 octobre 1933 et du 3 mai 1934. Le décret du 18 octobre 1933 acte également l'installation du Jury national dans l'enceinte du Conseil d'État.
En application de l'article 138 de la loi du 31 mai 1933, les administrations doivent déclarer les marchés visés par la loi au Jury national. Le commissaire du Gouvernement, nommé par décret contresigné par le garde des Sceaux, ministre de la justice, est chargé d'étudier les documents joints aux déclarations des administrations et d'établir des conclusions « écrites et motivées » (calculant notamment le bénéfice excessif devant donner lieu à reversement au Trésor) à destination du Jury. Il saisit le Jury national des marchés de guerre sur sa propre initiative ou sur la demande des ministères et des personnes publiques. Investi de pouvoirs particuliers de recherche et de communication, il réunit toutes les informations nécessaires à l'instruction des affaires. Le Jury national statue ensuite en section ou en section plénière et rend une décision fixant l'assujettissement au reversement forfaitaire des sociétés et le montant de ce dernier. Cependant, la complexité des procédures introduites en 1933 bloque les opérations. Un décret du 28 octobre 1934 fixe ainsi les modalités d'exercice des commissaires du Gouvernement près le Jury national des marchés de guerre et en élargit les pouvoirs d'examen et de recherche (le commissaire du Gouvernement pouvait se faire communiquer tous les documents et s'entretenir avec toutes les personnes s'il le jugeait nécessaire). Le 22 août 1935, un second décret renforce les cadres du Jury national en désignant douze rapporteurs spéciaux supplémentaires nommés par arrêté du garde des Sceaux. Les modalités générales de fonctionnement du Jury national sont précisées tardivement par le décret du 4 mars 1936.
En dépit de cet effort de réglementation, les procédures restent généralement inapplicables. Selon Frédéric Roujou, « dans la plupart des cas, les comptabilités des intéressés et les documents administratifs ont disparu : faute d'éléments pour établir ses calculs, le Jury national des marchés de guerre s'est trouvé dans l'impossibilité de déceler le moindre bénéfice abusif […] » [ROUJOU Frédéric,La Taxation des marchés de guerre : commentaire des décrets des 25 août 1937 et 3 mars 1938, Paris, Librairie du Recueil Sirey, 1938]. Pour pallier la complexité des procédures chronophages, et souvent inefficientes, le décret-loi du 25 août 1937 institue dans ses articles 20 et 21 un reversement forfaitaire plus simple, augmente le nombre des sections, qui passent de trois à six, et déclare nulles et non avenues les décisions du Jury national fondées sur l'article 138 de la loi du 31 mai 1933. Il stipule également que « les décisions du Jury pourront être frappées d'appel devant le Conseil d'État ». Les dispositions de ce décret répondaient ainsi à un double impératif : faire aux fournisseurs de guerre un sort identique et assurer au Trésor des rentrées certaines et rapides. Pour ce faire, un reversement forfaitaire, taxe assimilée aux contributions directes, est substitué au calcul des bénéfices par marché. Le décret-loi du 25 août 1937 est complété par un décret d'application en date du 3 mars 1938, qui fixe dans ses articles 10 et 13 les procédures devant le Jury national et devant le Conseil d'État et instaure dans son article 7 un système de sursis. Aux termes de l'article 2 du même décret, seules les personnes qui ont conclu des marchés ou opérations dont le montant total dépasse 500 000 francs sont soumises au reversement forfaitaire.
Au début de la Seconde Guerre mondiale, le décret du 23 décembre 1939 simplifie le fonctionnement du Jury national des marchés de guerre. Il diminue le nombre de sections (ramenées à deux) et de membres et élargit le recrutement des rapporteurs. En raison des circonstances exceptionnelles, des délais de paiement sont accordés aux entreprises par une commission spéciale instituée dans chaque département et présidée par le préfet.
Le Jury national des marchés de guerre est supprimé en 1960.
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reversement au Trésor des surplus de bénéfices des marchés de guerre
marchés de guerre